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Gestion urbaine des eaux pluviales > Valorisation en tant que ressource > Stockage et réutilisation domestique des eaux pluviales


La récupération des eaux de toitures et leur stockage dans des citernes constitue bien évidemment la solution la plus basique. Elle nécessite en effet un investissement minimum. De plus, cette ressource est en apparence "gratuite" et directement disponible au point d'utilisation. Sa récupération sur le toit permet en effet de la distribuer directement dans les maisons ou les immeubles par gravité, c'est-à-dire sans consommer d'énergie. Les eaux de toitures constituent ainsi la ressource principale dans beaucoup de régions (en particulier dans les zones arides comme l'Australie).



En France, la récupération de l'eau de pluie se développe. Elle a été encouragée par le label HQE qui en fait l’une de ces cibles. De ce fait elle a beaucoup été utilisée dans les bâtiments publics et en particulier dans les lycées (Viguier, 2006). La loi fiscale de 2008 prévoit une déduction fiscale pour les particuliers qui s’équipent et le Ministère de l’Aménagement du territoire préconise son utilisation.

Le marché se développe également de façon très rapide et, à titre d’exemple, la récupération des eaux de pluie a constitué l’un des sujets phares des salons Pollutec des 2 dernières années.

Pourtant de nombreux problèmes existent :
  • Les apports sont intermittents et nécessitent un stockage d'autant plus important que la variabilité de la pluviosité est grande. Le volume de stockage disponible limite la quantité mobilisable. De plus, il est généralement peu pratique de stocker l'eau sur (ou immédiatement sous) le toit, ce qui impose le plus souvent l'utilisation de pompes si on souhaite une distribution à l'intérieur de la maison.
  • La conservation de l'eau sur des durées longues conduit potentiellement à une altération de sa qualité physico-chimique et bactériologique. Ce risque est en fait assez faible. L'eau, même après quelque semaines de stockage reste au moins de qualité baignade (De Gouvello et al, 2004 ; CSTB, 2005). Malgré tout, il impose des contraintes à son utilisation (Janny, 2006 ; Chéron & Puzenat, 2004). En effet, le fait que les quantités récupérées soient, la plupart du temps, insuffisantes pour assurer la totalité des besoins impose de continuer à recevoir l'eau du service public. De ce fait les risques de réinjection d'eau potentiellement polluée sur le réseau public sont réels dès lors que la séparation stricte entre le réseau public et le réseau de distribution de l'eau de pluie récupérée ne peut pas être garantie chez les particuliers (voir par exemple les actes du colloque "eau et santé").
  • La récupération de l'eau de pluie "ressource" n'est pas nécessairement compatible avec la gestion des flux d'eau et de polluants produits par le ruissellement urbain. L'intérêt du particulier qui souhaite recueillir son eau est en effet de maximiser le remplissage de sa citerne, alors que la limitation efficace des flux d'eau et de polluants nécessite que le volume disponible pour le stockage soit maximum au début de la pluie, donc que la citerne soit vide.
  • Le développement de la récupération risque de conduire à une dérégulation économique des systèmes de gestion urbaine de l'eau. En effet, si le nombre de particuliers récupérant leur eau de pluie augmente, le risque existe de voir se développer un cercle loin d'être vertueux, comme illustré sur le schéma suivant :

    Risque de dérégulation économique lié à la récupération de l'eau de pluie
    Risque de dérégulation économique lié à la récupération de l'eau de pluie


  • Enfin se pose la question de la justice sociale. Dans beaucoup de pays, et en particulier en France, les particuliers payent leur redevance assainissement en fonction de l'eau potable qu'ils consomment, et la part assainissement représente un pourcentage en forte croissance de la facture d'eau. Cette approche est justifiée par le fait que les volumes rejetés sont voisins des volumes consommés, plus faciles à mesurer. Si la part de l'eau récupérée augmente dans les rejets (utilisation des eaux de pluie dans les chasses d’eau par exemple), elle devient source d’injustice. Il est à noter que, en France, la récupération des eaux de pluie, comme d’ailleurs celle des eaux d’un puits, doit faire l’objet d’une déclaration en mairie. Cette déclaration est cependant volontaire et, par exemple, les déductions fiscales prévues dans la loi de finance 2008 pour les particuliers investissant dans la récupération des eaux de pluie ne sont pas soumises à l’obligation de présenter le récépissé de déclaration.
Ces considérations expliquent probablement pourquoi la réglementation concernant la récupération des eaux de pluie est très variable selon les pays. Elle est parfois incitative (Australie, Chine, Corée, etc.), voire impérative et parfois très contraignante (cas de la France). L’exemple de la réglementation Belge est détaillé en exemple.

L’article 16 du RRU (Moniteur Belge, 2006), traitant de la collecte des eaux pluviales est ainsi rédigé :

« Les eaux pluviales de ruissellement issues de toutes les surfaces imperméables sont récoltées et conduites vers une citerne, un terrain d’épandage ou à défaut, vers le réseau d’égouts public.
Dans le cas d’une nouvelle construction, la pose d’une citerne est imposée afin notamment d’éviter une surcharge du réseau d’égouts. Cette citerne a des dimensions minimales de 33 litres par m² de surface de toitures en projection horizontale. »


Ce mode de dimensionnement, issu d’une étude hydrologique effectuée par Vaes & Berlamond (2004) est extrêmement innovant dans la mesure où, pour l’une des toutes premières fois, il met en avant la gestion des eaux pluviales (contrôle du ruissellement produit par les surfaces imperméables) et non la récupération de la ressource. La plupart des autres normes de dimensionnement font en effet référence au nombre de personnes habitant dans la maison (Han & Murase, 2006).


La réglementation française reste pour sa part ambiguë et plutôt restrictive. Ainsi en mars 2006, la Direction Générale de la Santé indiquait que la réutilisation des eaux pluviales :
  • « est à proscrire pour toute utilisation d’usage domestique : usages alimentaires comprenant la boisson, la préparation des aliments, le lavage de vaisselle, les usages liés à l’hygiène du corps comme l’alimentation des lavabos, douches, bains et le lavage de linge ;
  • est autorisée pour des usages "en dehors du bâtiment" : évacuation des excréta, lavage des sols et des véhicules, arrosage des espaces verts et des jardins ;
  • est tolérée à l’intérieur des bâtiments pour des projets situés dans des zones géographiques connaissant des difficultés d’approvisionnement avérées et pour des bâtiments pour lesquels il existe un service technique certifié compétent pour intervenir sur le réseau d’eau (collèges, lycées, bâtiments à usage professionnel). »
Malgré ces restrictions, la récupération est encouragée par la loi fiscale de 2008 et préconisée par le Ministère de l’Aménagement du territoire.