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Gestion urbaine des eaux pluviales > Conclusion générale


Finalement l'analyse précédente fait apparaître cinq tendances principales d'évolution.

La prise en compte locale de la capacité du milieu récepteur à recevoir les rejets urbains


La plupart des pays sont en train de passer de normes d’émissions (qu’à-t-on le droit de rejeter ?) à des normes "d’immissions" (qu’est-ce que le milieu naturel peut accepter ?). Même si sur le plan réglementaire ce type d’approche est plus difficile à gérer, les obligations imposées par la Directive Cadre Européenne sur l’Eau pour le retour au bon état écologique des masses d’eau, associées à la difficulté de mobiliser des ressources financières supplémentaires vont rendre cette évolution obligatoire, au moins en Europe.



La fin du tout à l’égout généralisé


Le modèle du réseau tentaculaire de collecte terminé par une énorme station d’épuration est en train d'exploser. L’utilisation des techniques alternatives pour gérer les eaux pluviales se développe dans toutes les nouvelles opérations d’aménagement. Les ouvrages sont de mieux en mieux intégrés dans la ville. La valeur patrimoniale des ouvrages existants est cependant trop grande pour qu'ils puissent être abandonnés. Le paradigme émergent consiste à optimiser le système global (réseau d’assainissement + station d’épuration + ouvrages complémentaires alternatifs de gestion des eaux usées et pluviales) dans l’optique d’améliorer au meilleur coût la qualité des milieux récepteurs.

Le développement d’une conception urbaine plus respectueuse de l’eau et de l’environnement


Il ne s’agit plus seulement de construire des systèmes d’assainissement efficaces, mais d’adapter la ville elle-même pour qu’elle modifie le moins possible le fonctionnement des milieux naturels. Les approches de type développement à bas impact ("low impact development") initiées aux Etats-Unis ou de développement urbain respectueux de l'eau ("water sensitive urban design") en Australie constituent des modèles à généraliser. L’exemple de Staten Island, présentée plus bas est tout à fait illustratif de cette approche.

Le développement de la récupération des eaux de pluie


Il s’agit d’une évolution de bon sens. L’eau est une ressource précieuse et il n’est pas raisonnable que les eaux pluviales ne soient pas valorisées chaque fois que c’est possible. Cependant, cette évolution doit être contrôlée. La récupération de l'eau "ressource" n'est en effet pas nécessairement compatible avec la gestion des flux d'eau et de polluants produits par le ruissellement urbain. L'intérêt du particulier qui souhaite recueillir son eau n’est pas nécessairement le même que celui de la collectivité. Par ailleurs, elle porte plusieurs risques qu’il faudra maîtriser : risque de dérégulation économique du système de gestion de l'eau, risques sanitaires pour la population, risques de modifications du bilan hydrique des sols urbains. Il faut donc dépasser l'idée de la simple récupération de l'eau dans des citernes pour bénéficier d’une ressource réputée gratuite. Cette récupération doit être intégrée dans une vision générale de gestion durable du cycle urbain de l’eau et diversifier les techniques mobilisées (citernes chez les particuliers, mais aussi stockage sous les rues pour alimenter la végétation urbaine, recharge des nappes phréatiques, etc.).

La valorisation climatique de l’eau


L’utilisation des eaux de pluie pour améliorer le microclimat urbain (abaissement des températures en utilisant l’évaporation et l’évapotranspiration de l’eau) constitue un enjeu majeur. En période de changement climatique et d’économie d’énergie, cette idée ne peut que se développer, d’autant qu’elle se conjugue parfaitement avec d’autres aspects environnementaux : réintroduction de la nature en ville, amélioration de la qualité de l’air. Elle combine dans beaucoup de cas un intérêt collectif (action au niveau de la rue, du quartier ou de la ville) et un intérêt individuel (réduction de la température intérieure des immeubles en utilisant par exemple des toitures terrasses).

L’une des difficultés à surmonter pour que ces évolutions se passent au mieux sera d’éviter le désintérêt des techniciens de l'assainissement pour ces nouvelles solutions, et, par effet de balancier, leur appropriation unique par les urbanistes, les paysagistes ou les aménageurs.

La ceinture bleue ("bluebelt") de Staten Island à New York un exemple réussi de conception urbaine respectueuse de l’eau


L'île de Staten Island est située en face de l'extrémité sud de Manhattan, de l'autre côté du bassin principal du port. Elle est reliée au continent (New Jersey), par le pont Bayonne, le pont Goethals et le pont Outerbridge Crossing, et à Brooklyn par le pont Verrazano. Elle compte un peu moins de 500 000 habitants pour une superficie de 151 km². Située dans l’une des plus grandes métropoles du monde et avec une densité de population de plus de 3 000 habitants par km², il s’agit sans aucun doute d’une zone urbaine dense.

Plan et photo de Staten Island, extraits de l’encyclopédie en ligne wikipedia
Plan et photo de Staten Island, extraits de l’encyclopédie en ligne wikipedia


L’île s’est développée de façon très rapide après l’ouverture du pont Verrazano en 1964 et de nombreux problèmes environnementaux sont apparus : pollution bactériologique des rivières, dégradation de leur qualité écologique, inondations sévères et fréquentes. Dès 1991, le New York City Department of Environmental Protection (NYCDEP) décide de mettre en place une stratégie innovante et multidisciplinaire d’assainissement. L’idée centrale consiste à s’appuyer sur le réseau dense de ruisseaux et de zones humides existant sur l’île pour gérer les eaux pluviales. Le système de "ceinture bleue" repose sur des systèmes traditionnels de collecte par un réseau séparatif dans les zones les plus denses. Ces ouvrages amènent l’eau dans une partie aménagée du réseau hydrographique de surface qui sert de zone tampon avant le système naturel. Trois techniques sont particulièrement utilisées : des bassins de retenue à plan d’eau permanent peu profond, des zones humides, et un reméandrage des rivières. L’ensemble : réseau traditionnel de collecte + ouvrages semi naturels de gestion + réseau hydrographique naturel, est considéré comme un seul et unique système hydrologique et étudié de façon globale. Cette "ceinture bleue" est complétée par une "ceinture verte" de parcs et de corridors qui assurent la continuité entre les espaces.

Une spécificité intéressante du projet a été la mise en place d’un comité consultatif de citoyens ("citizen’s advisory committee") d’environ 30 membres, choisis parmi des représentants d’associations de défense de l’environnement, d’associations civiques, d’associations de propriétaires, de représentants des promoteurs, etc.. Ce comité semble avoir joué un rôle très important pour l’adhésion des usagers au projet.

L’opération semble extrêmement bien réussie. A titre d’exemple, la tempête tropicale Tammy qui a touché New York en octobre 2005 n’a provoqué aucune inondation sur l’île.

L’opération "bluebelt" est listée sur le guide des infrastructures à haute efficacité ("High performance infrastructure Guidelines") du NYCDEP.

Cet exemple peut être généralisé à d’autres zones urbaines qui ont conservé un tissu dense de ruisseaux et de zones humides.

Référence : Gumb et al in Brelot et al, 2007